Page:Blandy - L Oncle Philibert.djvu/278

Cette page n’a pas encore été corrigée

ment exprimer sa pensée. Après avoir balbutié quelques syllabes inintelligibles, il en fut réduit à se taire.

La Jeannette Lizet trouva qu’on ne gagne pas toujours aux échanges ; Vittorio demeura préoccupé à ses côtés pendant le reste de la soirée. Dès le lendemain, elle publiait partout la grand fierté de ce Vittorio, qui avait été trop heureux autrefois de partager avec elle ses tartines de beurre fondu ; mais elle dut bientôt faire amende honorable, une nouvelle étonnante s’étant répandue le lendemain dans le pays. Vittorio partait soldat, et ce n’était pas faute d’argent, car il avait payé un homme au fils du sabotier, qui avait donc tous les bonheurs, ayant dans la même semaine marié sa heureux fille aînée et conservé son fils, le soutien de sa nombreuse famille.

« Ah ! il ne compte pas serré, ce garçon ! s’écria Claude Chardet, quand l’oncle Philibert vint lui annoncer cette nouvelle au logis vieux. Tu me diras qu’il paye de cette façon l’hospitalité que le sabotier lui a donnée quand il se croyait rejeté sur les chemins… Oui, on ne peut pas dire qu’il manque d’âme, mon filleul ! Voilà qui va bien, c’est à mon tour maintenant ; je vas lui acheter un homme à lui aussi.

— Non, mon père, n’en faites rien, répondit Philibert ; Vittorio est décidé pour l’état militaire, et je crois comprendre quel motif délicat l’empêche d’accepter l’offre que vous lui faisiez de se rapprocher de nous. »

Et il lui raconta la scène du bal, en lui rappelant que Vittorio et Alice s’aimaient dès l’enfance, et que le jeune homme agissait selon son devoir en s’éloignant tant qu’elle ne serait pas mariée, afin de ne pas se préparer des regrets en demeurant près d’elle.

« Il aurait certes accepté votre générosité, ajouta maître Philibert, s’il avait eu de bonnes raisons à vous donner pour