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Pétrus ricana méchamment et repartit en regardant Vittorio entre les deux yeux :

« Pour que tu te retranches si bien sur tes droits, il faut que tu sois fiancé avec Alice. Le père Chardet est donc décidé à ce que sa petite-fille s’appelle madame Vittorio ? »

Vittorio devint blême. S’il ne se fût agi que de lui, il eût fait payer cher cette insulte à Pétrus Courot ; mais il ne voulut pas se lancer dans une querelle qui aurait été, dès le soir même, la fable d’Uchizy. Tremblant de l’effort fait sur lui-même pour se contenir, il haussa les épaules, tourna le dos à l’insolent et s’assit auprès de Paul et de Jeannette, qui jasaient comme un couple de pies nouvellement dénichées.

« Paul, dit-il tout bas à son ami, veux-tu me rendre un service ? Changeons de chevalière pour tout le reste de la soirée. »

Paul se récria. La petite Jeannette le faisait rire aux éclats par son babil, car elle était à cet âge où la jeune fille n’a encore ni les grâces ni la retenue de la femme. C’était un être tout pétillant de drôlerie, une petite sauterelle brune, unique dans le bal pour sa laideur éveillée, la prestesse de ses entrechats et de son esprit. Elle était occupée, suivant son expression, « à prouver au jeune monsieur que les Chizerotes ne sont point sottes, dà ! » Et Paul s’amusait trop de sa verve pour renoncer facilement au plaisir de sa soirée.

« Comment, dit-il à Vittorio, la compagnie d’Alice t’ennuie déjà ! Ce n’est pas aimable de ta part.

— Paul, dit l’oncle Philibert, je te prie de faire ce que ton ami te demande. »

Cette intervention fut si gravement exprimée que Paul alla rejoindre sa sœur. Vittorio, devinant que l’oncle Philibert avait tout entendu, voulut lui parler de cet incident désagréable et lui expliquer sa conduite ; mais il ne sut com-