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pliment de ce mariage. Je suis content qu’elle épouse le Bénicheux, qui est un brave et bon garçon.

— Ah ! il est heureux, lui ! d’être un peu boiteux, s’écria Jean-Louis, en regardant de travers ses deux pieds qui battaient rageusement la place du Château. Ne crois pas, Vittorio, que je sois lâche, et que je regrette de servir mon pays ; mais c’est si cruel de laisser derrière moi, aux Effossés, tout ce jeune monde pas élevé à la charge d’un père quasi infirme.

— Bah ! bah ! cela s’arrangera », dit légèrement Vittorio, qui souriait toujours, et qui quitta la troupe des conscrits pour retourner tranquillement aux Ravières.

Jean-Louis resta un peu étonné de voir son ancien ami traiter si lestement une situation qui lui déchirait le cœur, à lui. Comme c’était un bon garçon sans rancune, il n’eut aucune amertume contre Vittorio, et il alla rejoindre la troupe des conscrits, accrue d’une foule de jeunes gens qu’un an ou deux séparaient encore du tirage au sort, mais qui ne cherchaient qu’à en fêter la cérémonie dans les cabarets. De ce nombre était Pétrus Courot, qui, après avoir passé cinq ans dans une petite pension de Pont-de-Vaux, sans y parvenir à débrouiller même les mystères de l’orthographe, était revenu au Pilori, où il commençait à désoler son père par ses frasques et ses folles dépenses. Il rejoignit les conscrits juste au moment où Vittorio se séparait d’eux.

« Fait-il le fier, cet enfant trouvé ! dit-il, depuis qu’il a rapporté de Paris ses airs pédants ! Il a beau se sangler dans un bel habit, il n’en est pas moins arrivé la première fois à Uchizy avec un étameur de casseroles.

— Tiens ! fit Jean-Louis, si cet étameur ne nous avait pas repêchés, toi et moi, dans la Saône, tu ne serais pas là à cette heure pour parler mal de son fils. Et, si Vittorio pouvait