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te parle pas de venir demeurer aux Ravières, d’en partir le matin à ma place, un râteau sur l’épaule, pour aller surveiller mes journaliers, et revenir le soir t’ennuyer près de nous. Mais tu pourrais monter près d’ici, à Tournus, par exemple, un atelier de mécanique… une usine, comment appelles-tu cela ? Je te prêterais les fonds nécessaires ; tu es mon filleul, mon devoir est de t’aider. Je te trouverais (tiens ! elle est trouvée d’avance, à Montbellet) une jolie et aimable femme qui t’apporterait de l’argent comptant, qui égayerait ta maison et te donnerait des enfants dont je me croirais quasiment le grand-père… Tu as l’air tout embarrassé… Je n’attends pas une réponse de toi aujourd’hui, mon garçon. Réfléchis à ce que je te propose. Prends ton temps, c’est assez sérieux pour cela. »

Vittorio amena le numéro sept. Jean-Louis, le fils du sabotier Jean Lizet, tira le numéro huit. Ce fut d’une émotion bien différente que ces deux jeunes gens subirent leur malechance commune : Vittorio sourit en dépliant son billet ; Jean-Louis devint tout pâle après avoir regardé le sien. Il n’y a pas de bonheur pour les pauvres gens, dit-il à Vittorio. Tu es venu nous voir dès ton retour à Uchizy ; tu n’es pas de ceux qui oublient leurs anciens amis, toi. Tu as vu comme le père est perclus de douleurs, son travail n’est plus de grand profit ; moi seul soutenais la maison et nourrissais la chère marmaille, et il va falloir que je prête mes bras au gouvernement quand ils feront tant faute aux gens de chez nous. Tiens ! le sort n’est pas juste !

— N’accuse donc pas le sort, lui répondit Vittorio en souriant ; c’est au moment où l’on se croit le plus malheureux qu’on est aidé et consolé. J’en suis un bon exemple. J’espère que le chagrin que tu as ne t’empêchera pas de danser après-demain aux noces de ta sœur. Je ne t’ai pas fait mon com-