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— Non ; il n’y a qu’un Bressan, et ce n’est pas la même chose. Les revenants, s’il en existe, sont des gens très malins, puisque leur seule occupation est de tourmenter le monde, et les Bressans, en fait de malice, vous savez ?… » Tout le monde éclata de rire dès ce début ; les Chizerots, de toute antiquité, assaillent de brocards moqueurs les Bressans, leurs voisins de l’autre bord de la Saône. Toute sottise dite ou faite est mise, à Uchizy, sur le compte d’un Bressan. Les Chizerots accusent leurs voisins d’être lourds d’esprit, gauches, faciles à abuser. Il est juste d’ajouter que, si l’on demandait aux Bressans l’apologie des Chizerots, ils la feraient en termes aussi peu louangeurs, bien que différents ; ils déclareraient leurs riverains trop délurés d’esprit, moqueurs à emporter la pièce, retors comme des procureurs, vifs et légers comme des pétards.

Ces aménités de voisinage ne tirent pas à conséquence et n’empêchent pas les bons rapports d’individus à individus. Tel Chizerot, qui accompagne toujours le nom de Bressan d’un lardon, a des amis en Bresse, auxquels il prêterait au besoin l’aide de ses bons offices, de ses bras et jusqu’à sa bourse.

« C’est donc un Bressan, dit le teilleur de chanvre, que j’ai rencontré à la dernière foire de Pont-de-Vaux. Il est de par là… de l’autre côté d’Arbigny, maire de sa commune… Bon ! je ne veux vous nommer ni la commune ni l’homme ! Vous n’auriez qu’à dire à mon Bressan, si vous le rencontriez, que je me suis gaussé de lui. Ça lui ferait de la peine, et je ne voudrais pas le fâcher, car il est bonhomme. Donc, je l’appellerai José.

— Cette finesse, dit une femme. Sait-on pas que tous les Bressans s’appellent José, et les Bressanes Josette ?

— Mon José, pour arroser sa nouvelle écharpe de maire,