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ter aux veillées dans l’étable qui réunissaient, sous la présidence du père Billot, le maître valet, les serviteurs du domaine et les voisins des Ravières. C’étaient tous de bonnes gens. Ils apportaient, selon l’usage, leur ouvrage, leur lampe et leur escabeau. Les hommes teillaient du chanvre, égrenaient du maïs ou épluchaient les haricots de leur coque séchée ; les femmes filaient, cousaient ou tricotaient. Les jeunes gens assis auprès de leurs promises s’amusaient à leur voler leurs pelotons de fil, leurs ciseaux ou leurs dés.

Les étables des Ravières étaient spacieuses, ayant été réparées selon les indications de maître Philibert. Les loges des bestiaux étaient en pente douce, et bœufs et vaches étaient assez nombreux pour entretenir une chaleur plus agréable que celle d’un calorifère. Il restait assez d’espace, de l’autre côté du ruisselet empierré par lequel s’écoulaient les eaux, pour qu’une vingtaine de personnes prissent place au-dessous des jougs appendus aux murailles. Les lampes étaient posées sur un billot ou sur l’embrasure des fenêtres basses, et tout aussitôt les fuseaux tournaient, les aiguilles mordaient dans l’étoffe, et langues de jaser à l’envi.

C’étaient justement ces contes d’hiver qui attiraient Paul dans l’étable où sa présence n’interrompait jamais les récits, car il n’y a pas de villageois moins timides que les Chizerots. Se sentant l’esprit alerte, l’imagination vive, ils se laissent peu déconcerter, et, selon leur expression, ni évêque ni roi ne leur couperait la parole au ras des lèvres.

Un soir donc que Paul, suivi par Vittorio, était allé rejoindre les veilleurs de l’étable, ils s’amusèrent tous les deux d’y entendre, pour la première fois de l’hiver, la causerie mise sur le fantastique créé par l’imagination campagnarde.

C’était une femme presque centenaire qui tenait le dé de la conversation, tout en tirant de sa quenouille chargée d’é-