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pu lacérer et détruire les pièces constatant l’état civil de Vittorio, si par hasard ce soupçon le traversait. Elle a mis beaucoup de bonne volonté à rassembler dans sa mémoire les souvenirs ayant trait à l’époque où Vittorio fut amené à Mozat, et voici ce qui en ressort :

« Vittorio appartient à une famille honnête, mais très pauvre, qui a tout entière péri dans un incendie ; lui-même, à demi brûlé, comme vous pouvez vous en assurer en examinant sur son épaule gauche une large cicatrice, fut recueilli par son oncle, dont la maison avait été également détruite dans cet incendie, qui avait fait des décombres de tout le village. Les villageois survivants, déjà à demi ruinés avant cet incendie par un autre cataclysme, — la grêle ou de mauvaises récoltes, ce point n’a pu m’être expliqué, — étaient désespérés, sur le point de périr tous de misère, lorsqu’ils furent sollicités par des recruteurs d’émigrants pour aller coloniser une pampa de l’Amérique du Sud. Ils étaient prêts à s’embarquer, lorsque Jacques Sauviac arriva dans ce pays, où il connaissait de longue date le père de Vittorio. L’oncle de celui-ci, déjà chargé d’enfants, presque élevés toutefois, se désolait d’être obligé d’exposer aux risques de la mer un enfant de six ans, mal guéri de ses brûlures, car un médecin prétendait qu’il ne supporterait pas la traversée. Jacques Sauviac fut ému de pitié ; il offrit de se charger du petit garçon ; ce qui fut accepté, vu qu’il était connu dans le pays comme un honnête homme.

« Maintenant, monsieur, dans quelle partie de la France se sont passés ces faits, c’est ce que la veuve de Sauviac ignore. Évidemment, son mari le lui a dit autrefois ; mais elle me nomme tantôt les Pyrénées, tantôt le Jura ; les tournées de l’étameur s’embrouillent dans son souvenir. La seule affirmation dans laquelle elle ne varie pas est celle d’une