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elle en préféra les longues antennes filiformes aux antennes barbues du paon de nuit. Enfin, Paul s’amusa de retrouver beaucoup de lettres de l’alphabet grec peintes, par l’adorable fantaisie de la nature, sur les ailes des phalènes omicron, double oméga, psy, lambda et iota.

Chacune de ces prises valait à l’oncle Philibert une foule de questions, auxquelles il répondait en faisant l’historique de chacune de ces phalènes, depuis sa sortie de l’œuf jusqu’à sa troisième mort après son existence d’insecte parfait, dont les derniers moments étaient occupés à assurer le sort de la génération future en logeant ses œufs sur l’arbuste propre à nourrir la petite larve.

Les enfants admiraient ce mystère de prévoyance maternelle, accompli par des êtres si frêles, qui ne devaient pas jouir de la vie de leurs enfants. Ils admiraient cette mutation d’état, et presque, pourrait-on dire, de personnalité, qui fait succéder à la larve la nymphe, et à celle-ci le papillon, trois êtres si différents l’un de l’autre, qu’on douterait de leur identité, si l’on n’avait suivi d’un œil attentif leurs transformations successives.

Ces études n’étaient pas considérées comme telles par les enfants, car elles les récréaient ; elles leur inspiraient un grand respect pour les moindres êtres de la création, et ils eurent beau voir les feux du lampyre (ver luisant) étinceler dans l’herbe, aucun d’eux n’eut la cruauté d’arracher cet insecte à son asile verdoyant, pour éteindre son phosphore à la lueur des lampes du logis neuf.

Ces chasses aux papillons furent interrompues par le voyage annuel à Gigny, dont tous les enfants voulurent être ; tante Catherine y accompagna son mari. Claude Chardet demeura donc seul aux Ravières, pendant que le reste de la colonie, remontant le cours de la Saône, s’établissait, pour