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aux Ravières toutes ses heures de liberté ainsi que ses dimanches, et l’on dut se rendre aux désirs du jeune garçon, qui les exprima avec une fermeté douce, en les appuyant sur la reconnaissance qu’il devait à Jean Lizet, et sur son en vie personnelle d’apprendre vite à gagner sa vie.

Claude Chardet vit bien un ressentiment de fierté dans ce refus de s’installer aux Ravières ; ce sentiment ne lui déplut pas ; il aimait les caractères tranchés, et de ce jour il tint Vittorio en plus haute estime qu’autrefois.

La ménagère de Jean Lizet n’eut pas à se plaindre d’avoir à défrayer un pensionnaire, tante Catherine s’étant mise à lui envoyer, chaque semaine, soit un panier de fruits, soit une tourte mollet, soit une corbeille de légumes, soit encore des hardes propres à servir à sa nichée d’enfants. Mais bientôt l’oncle Philibert eut à se plaindre de ses élèves.

Paul surtout n’étudiait plus, n’écoutait plus son professeur que d’une oreille distraite. Dès qu’on n’avait plus l’œil sur lui il disparaissait, et la pauvre Alice le cherchait vainement dans tout le domaine. Il revint un jour avec une forte entaille à deux doigts de la main gauche, qu’il s’était faite dans l’atelier de Jean Lizet, en voulant, lui aussi, creuser des sabots. En véritable enfant, Paul s’était engoué du nouveau métier de son ami, et il vivait plus aux Effossés qu’aux Ravières. Vittorio étant sabotier, Paul voulait le devenir ; pendant que son oncle lui débrouillait un texte latin, ou lui faisait une démonstration de mathématiques, la pensée de son élève creusait des pièces de bois ou traçait des losanges sur une empeigne de sabot.

C’est que pour avoir été sur le point de perdre à jamais son ami, Paul et même Alice l’aimaient mieux que jamais. Dans leur visite aux Effossés, ils le questionnaient curieusement sur son enfance, maintenant qu’ils le savaient seule-