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qu’il y aille, parce qu’il en sort toujours les yeux malades à force de pleurer, je l’ai suivi, et je l’ai trouvé à genoux devant le lit de ce brave monsieur Sauviac. Quand il m’a entendue, il s’est levé et s’est mis à faire son paquet. Je lui ai dit : « Mais tu ne pars pas encore, Vittorio ; tu es donc bien pressé ? » Et il m’a fait comme cela : « Oui, je suis un embarras pour tout le monde ; je m’en vais tout seul. Embrasse-moi, Marion, car je n’oserai pas embrasser les gens des Ravières ; ils me garderaient par pitié, et cela ne se doit pas. » Et je l’ai embrassé, ce pauvre petit.

— Mais comment ne m’as-tu rien dit, Marion ? s’écria Mme Chardet.

— Dame ! maîtresse, j’ai cru que c’était une chose convenue, et on a peur, nous autres, de se mêler aux affaires du grand monde. Mais, vrai, je m’en suis prise à mes yeux tout à l’heure quand j’ai trouvé dans la chambre de M. Sauviac toutes ces petites affaires que le pauvre enfant a laissées en souvenir. Ah ! il n’a oublié personne, pas même moi. Voyez si je sais bien lire. N’y a-t-il pas écrit : « Pour Marion, » sur ce petit papier attaché à ce foulard jaune ? Et dans le coin du foulard, voici une grosse pièce de cinq francs. Est-il fier, ce petit-là ! N’aura-t-il pas besoin de ses pauvres gros sous, puisqu’il est parti tout seul ? Si je savais où le trouver, je lui courrais après, oui, à seule fin de les lui rendre. »

La Marion posa sur la table un petit panier à ouvrage, finement tressé, dont l’anse maintenait une étiquette sur laquelle il y avait écrit : « Pour Alice ; » une corbeille à fruits, en osier peint, destinée à Mme Chardet ; un béret catalan, qui avait souvent fait envie à Paul, et qui lui était laissé en souvenir ; une boite en buis, sur laquelle Vittorio avait naïvement mais fidèlement sculpté des scarabées, et