Page:Blandy - L Oncle Philibert.djvu/19

Cette page n’a pas encore été corrigée

autres communes. Cela se pratiquait ainsi autrefois ; mais les modes changent. Qu’y faire ?

— Je dis et je prétends que si ton maître s’en était tenu aux vieilles coutumes, il serait plus heureux qu’il n’est, et sa maison autrement gaie. S’il n’avait pas eu la vanité de faire élever son fils Philibert au collège, et sa fille Marie en pension, à Mâcon, tous les deux se seraient mariés à Uchizy. Philibert aurait été un bon propriétaire de campagne, comme moi ; et, si la destinée était que Marie mourût jeune, au moins les enfants qu’elle a laissés seraient restés avec leur grand-père pour le consoler. Au lieu de cela, Alice et Paul sont demeurés chez leur oncle Thonnins, qui, paraît-il, est un docteur, un gros monsieur à Lyon. Il fera de la petite une vraie demoiselle, et de Paul un citadin ; et, quand les enfants viendront en visite ici, peut-être bien seront-ils vexés de trouver leur grand-père si paysan… Enfin Claude Chardet a voulu tout cela… Encore un coup, père Billot !

— Ce sera le dernier, dit en se levant le maître valet, et nous allons le boire à la prospérité de votre maison et au bonheur de mon maître. Je ne puis pas vous répliquer sur tout ce que vous avez dit. Je suis plus habile aux coups de pioche qu’aux coups de langue ; m’est avis pourtant que je porte cette santé-là d’un meilleur cœur que vous.

— Qu’entends-tu par là ? » demanda Joseph Courot qui craignit d’avoir trop exprimé ses sentiments secrets devant ce fidèle serviteur des Ravières.

Le maître valet ne lui répondit que par un sourire un peu ironique. Reprenant son broc presque vide, il salua la compagnie et s’achemina vers la maison de son maître, en se disant qu’il avait, lui, plus de chance qu’un riche d’avoir de vrais amis, vu qu’il ne possédait rien qui pût lui susciter des envieux.