Page:Blandy - L Oncle Philibert.djvu/144

Cette page n’a pas encore été corrigée

sains au mois de juillet ; par une bizarrerie imposée et que n’expliquent pas les anciens dictons, l’on prétend que ses eaux n’ont une action bienfaisante que durant ce mois-là. Aussi les bords de la Saône sont-ils très fréquentés entre juin et août.

On part dans l’après-midi, par groupes de voisins et de voisines ; on franchit en causant les deux kilomètres de la route qui descend à la Saône, et, après le bain, au soleil couchant, on dîne sur l’herbe du rivage pour retourner ensuite, le corps rafraichi, l’estomac restauré, vers le village. Ces parties n’étant pas tant considérées comme un plaisir que comme un traitement, il n’y a pas de Chizerote, depuis la femme du riche propriétaire jusqu’à l’artisane et à la fille de ferme, qui n’aille prendre sa série de bains. Mme Chardet, n’ayant pas été élevée à Uchizy, n’avait pas de préventions contre les bains d’août ; son pays natal, le joli village de Gigny, côtoie la Saône au point de mirer dans ses eaux bleues les maisons d’un de ses hameaux. Les habitants y vivent donc en plus grande familiarité avec la rivière que ceux d’Uchizy. La Saône est à leurs pieds et parfois même elle vient voisiner jusque dans leurs logis quand elle s’étale dans les crues. Ce petit dommage est compensé par le bienfaisant limon qu’elle dépose sur leurs prairies, et les Gignerots vivent aussi paisibles dans leurs maisons que les martins-pêcheurs dans leurs nids cachés au bord d’un rivage.

Tante Catherine aimait donc la Saône. Comme elle n’avait pu se résoudre à quitter la maison pendant la maladie de sa nièce, elle avait remis à la convalescence d’Alice le plaisir des bains froids. Vers la fin de juillet, la fillette pouvait sortir en voiture ; Jacques Sauviac lui permettait même de marcher un peu, le joli petit pied étant sorti sain et ferme