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voilée, Claude Chardet reconnut dans l’individu qu’il avait si cavalièrement accueilli le docteur Lafon, le meilleur médecin de Tournus.

« Comment, c’est vous, monsieur le docteur ? lui dit le maître des Ravières. Ah ! voilà une aventure ! Excusez-moi, ce n’est pas à vous que je pensais parler. Je suis satisfait de vous voir ; ma petite malade n’est pas bien. Mais où est donc l’étameur ?

— Mon père, dit Vittorio en s’avançant, il doit être couché dans le fenil.

— Non pas, on l’y a cherché.

— Il se sera fourré dans quelque coin pour être loin des autres et ne pas recevoir des coups de pied.

— C’est donc lui qui t’a commandé d’aller à Tournus ?

— Pas du tout, monsieur, répondit Vittorio. Je ne lui ai pas seulement parlé depuis que nous sommes chez vous. Au diner, on avait insulté mon père ; vous étiez soucieux pendant qu’on se moquait des rebouteurs ; monsieur votre fils que voilà paraissait aussi tourmenté que vous ; je sentais que le cœur de mon père était gonflé par l’humiliation. Alors j’ai pensé que vous n’osiez pas envoyer chercher un médecin de peur de vexer l’homme qui vous avait ramené vos enfants, et, ma foi, d’un coup de dépit et de fierté, j’ai couru à l’écurie sans autrement réfléchir. Si j’ai pris une voiture à vous, c’était pour ramener M. le docteur. Je vous demande pardon d’avoir usé de votre bien sans votre permission… Maintenant, ajouta Vittorio avec une fierté qui fit sourire les trois hommes, si j’ai abimé quelque chose, je puis payer les frais. J’ai quatre-vingt-huit francs d’économies.

— Quel drôle de garçon ! dit Claude Chardet en donnant une tape amicale sur la joue de Vittorio.

— Oui, répondit le docteur en montant le perron avec les