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ORGANISATION

On avait calculé sur tout, excepté sur l’existence des objets d’échange et la facilité de leur transmission. L’Amérique garda son or, qu’on ne put extraire de ses mines ; le pays, qui avait été mis à feu et à sang, n’eut à donner, en échange des marchandises qu’on lui apportait, ni son coton, ni son indigo. Ce que cette grande mystification coûta aux anglais de millions et de larmes, les anglais le savent, et l’Europe aussi !

Et qu’on ne dise pas que nous concluons de l’exception à la règle. Le vice que nous avons signalé a enfanté tous les maux qu’il portait en lui. Car, tandis que l’Angleterre, au dehors, s’épuisait en efforts à peine croyables pour rendre l’univers entier tributaire de son industrie, quel spectacle son histoire intérieure offrait-elle à l’observateur attentif ? Les ateliers succédant aux ateliers ; l’invention du lendemain succédant à l’invention de la veille ; les fourneaux du nord ruinés par ceux de l’ouest ; la population ouvrière s’accroissant hors de toute mesure sous les mille excitations de la concurrence illimitée ; le nombre des bœufs, qui servent à la nourriture de l’homme, restant bien loin de celui des chevaux, que l’homme est obligé de nourrir ; le pain de l’aumône remplaçant peu à peu celui du travail ; la taxe des pauvres introduite et faisant pulluler la pauvreté ; l’Angleterre, enfin, présentant au monde surpris et indigné le spectacle de l’extrême misère couvée