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remplace ; on ne punit pas une situation mauvaise, on la change. Des appels farouches à la colère des opprimés seraient donc aussi frivoles que funestes. D’autant qu’en masse le peuple n’est pas aujourd’hui assez éclairé pour avoir une idée nette de ce qu’il doit vouloir et de ce qui est possible. Mais le devoir de chercher remède à tant de maux n’en est que plus impérieux. Et, pour la bourgeoisie, l’intérêt est pressant. Elle aussi, elle est minée par la concurrence, qui va détruisant peu à peu les existences modestes et engloutissant les fortunes moyennes dans l’opulence des gros capitalistes. De quelle sécurité peut jouir la bourgeoisie entre le danger des emportements populaires et le joug oligarchique lentement forgé pour elle ? Preuve frappante et nouvelle de l’inévitable solidarité des intérêts ! La bourgeoisie, si elle n’y prend garde, marche à sa ruine par le chemin sur lequel souffre le peuple. Malheureusement, elle ne paraît pas s’en être doutée jusqu’ici. « Le travail est un frein », disait un jour M. Guizot, et, plus tard, du haut de son fauteuil de président, M. Sauzet affirmait que la Chambre n’avait pas charge de fournir du travail aux ouvriers !

Encore, si la nationalité n’avait pas fléchi ! Mais, dans la politique étrangère comme dans la politique intérieure, la bourgeoisie n’a eu ni prudence vraie ni coup-d’œil. Voulant la paix d’une ardeur violente, elle a eu l’étourderie de ne s’en point cacher. Elle a mis à s’humilier une affectation folle. Aussi, les occasions de guerre se sont-elles multipliées à l’excès. Que de provocations ! que de mépris ! Un