Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/29

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il leur avait dit « Soutenez-moi. Le cœur va, mais les jambes ne vont plus. » Les trois condamnés allèrent se placer, les mains liées derrière le dos, au pied de l’instrument du supplice, les prêtres qui les assistaient leur donnant à plusieurs reprises le crucifix à baiser. En cet instant suprême, un commissaire de police vint avertir Pépin que, s’il avait des révélations à faire, il serait sursis pour lui à l’exécution. Il répondit avec fermeté qu’il n’avait rien à dire.

Il s’écoula un moment d’inexprimable angoisse. Puis, un homme fut aperçu qui, la figure pâle, un long manteau jaune sur les épaules, montait d’un pas assuré les degrés de l’échafaud c’était Pépin. Arrivé sur la plate-forme, il cria : « Je meurs innocent, je meurs victime, adieu ! » leva les yeux au ciel, et se livra aux exécuteurs.

Morey vint ensuite. Il n’y avait pas la plus légère altération sur ses traits, et il gardait le silence. Seulement, comme l’exécuteur portait sur ses vêtements une main brusque « Pourquoi, lui dit-il avec douceur et à voix basse, gâter ce gilet ? il peut servir à un pauvre. » Quand on ôta au vieillard son bonnet de soie, ses cheveux blancs furent soulevés par le vent sur sa tête nue. Et il se fit dans la foule un mouvement suivi d’une rumeur sourde.

C’était le tour de Fieschi. Accompagné du digne abbé Grivel, qu’il avait prié « de ne le quitter que le « plus près possible de l’éternité », il s’avance fièrement, prend sur l’échafaud l’attitude d’un orateur, prononce quelques paroles d’adieu, de repentir, et, se penchant vers son confesseur : « Je voudrais bien