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aggraver la législation de septembre par le téméraire et brutal appendice des lois de disjonction, de déportation, de non révélation ? Si M. Guizot criait à M. Molé « Vous êtes coupable a M. Molé n’allait-il pas lui répondre : « Vous êtes mon complice. » Que faire donc ? Inspiré et poussé parses intimes, M. Guizot prit un parti qui ne prouvait pas sa sincérité, mais qui plaisait à son audace. Il résolut de se donner comme ayant représenté spécialement, dans le Cabinet dissous, la politique de Casimir Périer cette vieille politique de résistance sous laquelle l’esprit révolutionnaire avait fléchi. C’était se parer d’un rôle monstrueux car, depuis Casimir Périer, la société n’avait cessé de pencher vers le repos, et la langueur des partis y rendait tout au moins superflu le gouvernement de la colère. Mais M. Guizot n’ignorait pas que dans la plupart des hommes dont s’était composée l’ancienne majorité, la guerre civile avait laissé une trace brûlante. Il espéra les attirer à son ambition en les enivrant du souvenir de leurs triomphes passés, en leur montrant toujours debout et toujours armé l’esprit révolutionnaire, immortelle pâture de leurs passions ; en leur soufflant enfin la peur et la haine. Alors, de deux choses l’une ou M. Molé se laisserait imposer une politique sauvage et il périrait par l’excès ou bien il ferait effort contre l’impulsion donnée, et, trop faible, il tomberait chargé de mépris.

L’exécution de ce plan fut poursuivie avec une impétuosité singulière. Dans la commission des fonds secrets, les amis de M. Guizot sommèrent fièrement M. Molé de s’expliquer sur le retrait de la