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nouvelle de la formation du Cabinet dirigé par M. Molé les inquiétudes du gouverneur redoublèrent. La chute de M. Thiers enlevait à ses projets un soutien l’hiver approchait, l’effectif général dans la Régence n’allait pas au-delà de 28,000 hommes, ce qui ne fournissait guère que 25,000 combattants. Pressé d’agir, le maréchal fit sur-lechamp partir pour Paris M. de Rancé, avec mission de solliciter un renfort de 10,000 hommes.

Les ministres du 6 septembre se trouvaient, à l’égard de l’Afrique, dans une situation fort embarrassante. D’une part, ils ne voulaient point dépasser les crédits, compromettre leur responsabilité devant la Chambre, se laisser entraîner, à la suite de M. Thiers, dans un système dont la hardiesse les accablait. D’autre part, il leur paraissait dur d’avoir à abandonner une entreprise dont la nation se promettait gloire et profit ne risquaient-ils point par là d’ajouter à la popularité de M. Thiers et de découronner en quelque sorte leur avènement ? Ainsi ballottés entre des sentiments contraires, ils avaient décidé que l’expédition serait faite, mais sans accroissement notable de ressources et ils s’étaient bornés à expédier en Afrique, pour y compléter un effectif général de 30,000 hommes, des bataillons qui étaient déjà partis quand M. de Rancé arriva.

M. de Rancé ayant expliqué l’objet de sa mission, on lui répondit par un refus fondé sur ce que le seul chiffre écrit dans les dépêches était celui de 30,000 hommes. En vain exposa-t-il que le maréchal Clauzel avait demandé 30,000 combattants, et non 30,000 hommes, parmi lesquels des malades et des