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suite, durant tout le voyage, que l’expression d’un ressentiment contenu avec effort.

Vers le milieu du jour, la corvette l’Agate signala le bateau à vapeur le Bordelais qui, descendant la Gironde, se dirigeait sur la rade de Richard. Le transbordement se fit sans difficulté. Les personnes qui devaient accompagner Marie-Caroline jusqu’à Palerme étaient le prince et la princesse de Beauffremont, M. de Mesnard, M. Deneux, M. Ménière, le général Bugeaud et son aide-de-camp, puis, pour le service de la princesse, Mlle Lebeschu et Mme Hansler. Des affaires urgentes avaient rappelé au sein de sa famille M. de Brissac, et le voyage avait été interdit à la comtesse d’Hautefort, à qui sa santé ne permettait pas d’en affronter impunément les fatigues. Au moment de se séparer, et pour toujours peut-être, d’une princesse dont elle avait si long-temps partagé la captivité, Mme d’Hautefort avait peine à cacher les déchirements de son cœur ; son visage était inondé de larmes, et ces émotions d’une tendresse inquiète paraissaient toucher vivement Marie-Caroline.

Le 9 juin, l’Agate s’éloignait du sol de France. En vue de Palerme, la corvette salua la terre par une salve de vingt-un coups de canon, et aussitôt l’on entendit gronder toutes les batteries du port. L’Agate ayant jeté l’ancre, une foule d’embarcations furent lancées à la mer. Plusieurs d’entre elles portaient des musiciens ; et des couplets sur la princesse, sempre tormentata, se mêlèrent au bruit de la rame agitant les flots. D’après l’étiquette de la cour de Sicile, le vice-roi ne se peut déplacer que pour recevoir le roi lui-même. Le comte de Syracuse, frère du