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taire un certain nombre de partisans qui l’aimaient de toute la haine que leur inspiraient MM. de Broglie et Guizot. Tous ceux qui brûlaient de supplanter ou de mortifier les doctrinaires, coururent se ranger autour de M. Thiers. L’occasion était favorable, la marche à suivre toute tracée M. Gouin prendrait l’initiative, et développerait, à la tribune, les avantages de la réduction des rentes ; la prise en considération serait proposée ; le tiers-parti se joindrait à la gauche pour obtenir, en faveur de la proposition, un vote de majorité ; et le Cabinet du 11 octobre, renversé par ce vote, ferait place à un ministère qui, fourni par les vainqueurs, serait présidé par M. Thiers. Tel était le plan. M. Thiers ne crut pas devoir s’y associer, soit qu’il n’osât pas encore rompre avec les doctrinaires, soit, plutôt, qu’il reculât devant le déshonneur d’une perfidie. Il fit plus, il poussa plusieurs de ses amis, et, entre autres, M. Ganneron, à voter pour le Cabinet. Et lui-même il se tint prêt à soutenir le choc du tiers-parti, dans cette question, avec une loyale énergie.

En effet, le 4 février 1836, le combat s’étant engagé, à la Chambre, par un savant discours de M. Gouin en faveur de la réduction des rentes, et M. Passy ayant soutenu vivement M. Gouin, M. Thiers parut à la tribune : « La mesure est juste, s’écria-t-il, mais elle est dure. » Et il développa ce thème dans une improvisation étincelante. La cause était mauvaise ; car, considérée dans sa valeur intrinsèque et indépendamment du parti qu’en voulaient tirer les passions en lutte, la mesure que M. Thiers repoussait était de tout point inatta-