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on avait même parlé d’une enquête. M. Deneux crut, non sans raison, qu’en allant faire à Blaye, par ordre du gouvernement nouveau, ce qu’il avait fait aux Tuileries le 29 septembre 1820, il mettrait les courtisans dans l’impossibilité de combattre l’autorité de son premier témoignage.

Voulant détruire à tout prix l’accusation de mensonge qui pesait sur eux, les ministres avaient intérêt à faire certifier la grossesse de la prisonnière par des hommes de son propre parti. Or, le dévoûment, de M. Deneux à la mère de Henri V était connu, et sa qualité d’accoucheur donnait à sa présence à Blaye une signification sur laquelle il était impossible qu’on se méprît. Sa démarche fut donc favorablement accueillie par le conseil, et ce fut pour les légitimistes un nouveau sujet d’affliction et de colère. Il partit, arriva le 24 mars à Blaye, et admis le lendemain dans la citadelle, il fut introduit dans l’appartement de la princesse. Elle était couchée, avait le visage amaigri, le teint jaunâtre, les joues caves. Apercevant M. Deneux, elle lui tendit la main, et dit avec une grâce mêlée de tristesse : « Ce bon M. Deneux ! J’étais bien sure qu’il viendrait près de moi. » Vivement ému, le vieillard se précipita au pied du lit avec des sanglots et fut sur le point de s’évanouir. Quand il fut revenu de son trouble, la princesse lui dit : « Mon bon M. Deneux, pour moi vous avez quitté votre femme, abandonné vos affaires, compromis votre clientelle : je ne saurais accepter un tel sacrifice. » Et comme il ne répondait que par l’expression d’un dévoûment sans bornes : « Mais, poursuivit-elle en découvrant le fond de sa