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manière injurieuse. Les choses en étaient venues au point qu’un duel s’en serait suivi peut-être, si on ne se fut empressé d’étouffer la querelle.

Pour la formation d’un nouveau Cabinet, le roi s’adressa naturellement à M. Persil. Le goût de M. Persil pour le pouvoir et son dévoûment personnel pour Louis-Philippe lui interdisaient toute hésitation. Il courut pendant la nuit chez M. Dupin aîné. Celui-ci refusa d’entrer dans un ministère évidemment appelé à jouer une partie incertaine, mais pressé par M. Persil d’aider le roi de ses conseils, il prit l’almanach royal, parcourut des yeux la liste des pairs et celle des députés, marqua quelques noms… Ce fut là l’origine burlesque du ministère des trois jours.

Le lendemain, pour enchaîner au Cabinet nouveau M. Dupin aîné, on offrit à son frère, M. Charles Dupin, le portefeuille de la marine. M. Passy, désigné pour le portefeuille des finances, était à Gisors. Sur la prière de M. Persil, M. Teste partit pour Gisors, d’où il ramena M. Passy dans la nuit du 9 au 10 novembre. M. Passy ne témoignait nulle envie d’entrer au pouvoir ; mais le garde des sceaux en fit valoir à ses yeux l’urgence en termes si énergiques et si vifs, qu’il se sentit ébranlé. Il désira, toutefois, conférer de cette acceptation périlleuse avec M. Calmon, son ami. On se rendit, en conséquence, chez M. Calmon, et de là chez M. Dupin aîné, qui, à la vue de M. Passy, s’écria en se jetant presque à son cou « Eh bien, vous acceptez ? On ne dira pas, maintenant, que nous sommes des hermaphrodites ! » Mot qui révèle la véritable