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de la quadruple alliance. Des hommes qui n’en connaissaient même pas les clauses se prirent à en exagérer l’importance jusqu’au ridicule. A les entendre, ce n’était pas moins qu’une vaste et durable confédération des monarchies constitutionnelles dans un but vraiment européen ; un contrepoids venait d’être trouvé à la sainte-alliance, à la vieille politique du Continent ; l’ère de la diplomatie moderne venait de s’ouvrir. Si bien que, grâce aux commentaires de quelques gazetiers mal informés, grâce aux hâbleries de quelques diplomates à la suite, des proportions imposantes furent données à un traité de circonstance, qui ne réglait que des intérêts passagers, et qui n’avait évidemment ni portée ni avenir. Mais ce qu’il y eut de plus extraordinaire, c’est que M. de Talleyrand atteignit, du coup, aux dernières limites de sa renommée. Dans une œuvre qui était si loin d’être la sienne, on ne manqua pas de voir le résultat de ses profondes méditations, le couronnement des travaux de sa vie diplomatique. Or, on lui avait fait dans la négociation une part si humble, si tardive, si conforme en un mot, à sa médiocrité, que Louis-Philippe eut un moment le dessein d’en témoigner son humeur à M. de Miraflores, quand il fut question de décerner aux signataires du traité les distinctions honorifiques d’usage !

Au reste, cette alliance anglaise dont on lui attribuait, avec une amphase aussi niaise que mensongère, le mérite d’avoir formé les nœuds, M. de Talleyrand ne la prenait pas tellement à cœur qu’il ne fût disposé à la sacrifier aux premiers mouvements de son orgueil offensé ; et nous le verrons, dans la