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casque et sabre, part sur-le-champ pour Nancy, où Stiller, son camarade, doit le mettre en rapport avec un des principaux chefs du parti républicain. Aussitôt, un mouvement inaccoutumé agite les quartiers des trois régiments ; le bruit se répand qu’on va se diriger sur Paris. Avertis de se tenir prêts à monter à cheval, les soldats font leurs porte-manteaux, placent les selles sur les lits, s’approvisionnent d’eau-de-vie et achètent des pierres à feu. Déjà les conspirateurs ne se cachent plus de leur dessein. Rencontrant un cuirassier occupé à nettoyer la poignée de son sabre : « Mieux vaut, lui dit de Régnier, en aiguiser la lame. » En même temps, par les soins de Thomas et de Bernard, tous les sous-officiers ont été invités à se rendre au Champ-de-Mars, après l’appel. À huit heures du soir, maréchaux-des-logis-chefs, maréchaux-des-logis, fourriers, s’acheminaient mystérieusement vers le rendez-vous convenu, marchant dans les rues par groupes de trois ou quatre. Bientôt, dans une grande carrière de sable située à l’extrémité du Champ-de-Mars, ils se trouvèrent réunis au nombre d’environ quatre-vingts. Thomas les ut ranger par régiments, et prenant la parole, il leur exposa les motifs du complot, le plan qu’il fallait suivre, les ressources dont on disposait, les chances de succès, la nécessité d’agir avec audace et promptitude. Vivement soutenue par Bernard, cette allocution excite dans l’assemblée un sombre enthousiasme. Le 10e régiment paraissant hésiter : « Nous mettrons le feu au quartier du 10e, » crie une voix. Le sort en est jeté. On se sépare, en disant : À minuit !