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plus étaient celles qui avaient trait à l’augmentation de l’armée. Aussi eut-il soin d’objecter que les fonds manquaient pour la mesure proposée ; qu’il y aurait lieu, par conséquent, à une demande de crédit qu’on n’était pas sûr de voir accueillie avec faveur ; qu’on s’exposait gratuitement à des orages parlementaires dont on ignorait les suites que, pour son compte, il ne se souciait nullement de jouer sa responsabilité sur un coup de dé. M. Thiers insista, il représenta que la cause de Christine était la cause de la révolution de juillet elle-même, il se fit fort d’en convaincre la Chambre, et l’emporta enfin.

Les débats duraient depuis plusieurs jours : le Conseil s’assembla une dernière fois pour arrêter d’une manière définitive la mesure en discussion. Quel fut l’étonnement du roi et de M. Thiers, quand tout-à-coup le maréchal Soult s’écria, en parlant des nouvelles troupes qu’il s’agissait de lever : « Je n’en ai pas besoin ! » Cette sortie à laquelle personne ne s’attendait, émut vivement le roi, qui, à ce qu’on raconte, s’emporta jusqu’à dire : « Monsieur le maréchal, vous faites du gâchis. — Le maréchal Soult ne fait pas de gâchis », répliqua le ministre, en proie à un ressentiment contenu. Et il sortit brusquement. Le changement imprévu qui s’était manifesté dans son opinion fut attribué par certains de ses collègues à des préventions que lui aurait bassement suggérées un agent subalterne. Cet agent lui aurait fait croire qu’on n’avait mis la mesure sur le tapis que pour le compromettre devant les Chambres et le laisser tomber sous le coup