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rendre inefficace la convention du droit de visite, ne suffisait-il pas qu’une seule nation refusât son concours ? L’Amérique, par exemple, qui se déshonore en tolérant l’esclavage, elle qui se dit républicaine, l’Amérique ne fournissait-elle pas aux négriers un moyen infaillible de se soustraire à toute poursuite en arborant le pavillon américain ? Le traité signé entre MM. Sébastiani et Granville était donc attaquable sous ce rapport. Il avait, de plus, l’inconvénient grave de donner aux Anglais, tyrans bien connus, tyrans incorrigibles des solitudes de la mer, le prétexte de vexer notre marine, d’entraver notre commerce, d’humilier nos matelots, de contrôler nos mouvements avec insulte, et tout cela au nom de la philantropie, artificieusement invoquée. Il est vrai que, le droit étant réciproque, la voie des représailles nous restait ouverte ; mais, outre que le traité rétrécissait devant nous cette voie en autorisant l’Angleterre à entretenir deux fois plus de croiseurs que la France, tout système de représailles mène a la guerre, et la témérité est grande de déposer au fond d’une alliance le germe d’inévitables discordes[1]

    solution a été celle de tous les esprits sincères et élevés. Mais hélas ! c’est sur la difficulté d’exécution que les adversaires de la mesure ont triomphé ! Les souverains s’entendent aisément et n’ont pas de peine à former des congrès, lorsqu’il s’agit pour eux de tyranniser les peuples avec ensemble ou de se les partager ainsi qu’un vil bétail ; mais il paraît qu’entre ces mêmes souverains l’union devient très-difficile, lorsqu’il ne s’agit plus que d’arracher à quelques brigands des milliers de pauvres victimes ! …

  1. Voilà ce que n’a peut-être pas suffisamment pesé M. Schœlcher le plus noble assurément et le plus sérieux de tous les défenseurs de ce traité du droit de visite, devenu si célèbre.