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droit d’occuper le Bosphore quand bon leur semblerait. Ce droit, ils le puisaient dans leurs précédentes conquêtes, dans leur prépondérance, dans leur voisinage dans leur force. Le traité d’Unkiar-Skelessi n’avait donc que la valeur d’une bravade, mais d’une bravade habile ; car elle parlait vivement à l’imagination des Turcs, et elle accoutumait l’Europe à trouver naturelle la suzeraineté de Saint-Pétersbourg sur Constantinople.

On peut voir maintenant combien fut fatale aux intérêts de la France la manière dont s’engagea cette question d’Orient, source de tant d’orages. Nous ne saurions trop le répéter : dès qu’à tort ou à raison, le gouvernement français adoptait pour principe l’intégrité de l’empire ottoman et son maintien sous un prince légitime, il y avait folie ou mauvaise foi à permettre que Méhémet-Ali s’agrandit aux dépens de la Porte. La politique de l’amiral Roussin était, par conséquent, dans le système auquel on se résignait, et la plus loyale et la plus sage. Malheureusement, cette politique oscilla et se démentit d’une façon déplorable, grâce à l’inconsistance du gouvernement français et au désordre diplomatique qui en fut le fruit. Entre le système que représentaient les mesures arrêtées en faveur de Mahmoud le 21 février par l’amiral Roussin, et les conditions consenties plus tard à Kutaya en faveur de Méhémet-Ali, il y a un abîme. Or, de ces deux systèmes, le premier, qui avorta, ébranlait notre crédit auprès du pacha d’Égypte ; le second, qui prévalut, ruinait notre influence auprès du sultan. Le premier tendait à nous aliéner Alexan-