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sère et l’excès du travail cette race arabe qu’il ne triturait depuis si long-temps que comme la matière inerte de sa gloire, et qui n’avait jamais fourni un colonel à ses armées, croit-on qu’il en eût fait, au détriment des Turcs, la race dominante, et qu’il eût tenté par elle de régénérer l’empire ? Il y a folie à l’imaginer. Et puis, de quelle manière cette régénération se serait-elle accomplie ? Est-ce que, sous Méhémet-Ali comme sous Mahmoud, il n’y aurait pas eu en Turquie une masse confuse de populations diverses, ennemies, tendant par un effort continuel à se disjoindre et à s’affranchir ? Méhémet-Ali aurait-il empêché les Maronites du Liban d’être catholiques, et les Druses d être idolâtres ? Aurait-il enlevé aux Grecs, aux Juifs, aux Arméniens, leur caractère de Grecs, de Juifs, d’Arméniens ? Par quel excès de tyrannie, par quel procédé d’administration en serait-il venu à substituer l’unité à cette diversité fatale que les populations avaient sucée avec le lait et qui coulait dans leur sang ? Le peuple conquérant, le peuple turc, n’ayant cessé de s’appauvrir et de se démoraliser, pendant que les différents peuples conquis croissaient en importance et en richesses, le seul moyen d’unité qui eût existé en Turquie, la violence combinée avec la force, avait évidemment péri, et il avait péri pour Méhémet-Ali aussi bien que pour Mahmoud. Méhémet-Ali, à Constantinople, n’eût donc été, quoiqu’on en ait pu dire, qu’un homme plein de vie à la tête d’un empire mort.

L’empire ottoman ne pouvant subsister, venait la question du partage. Mais ce partage aurait-il pu se