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peu-près le même aspect que la veille. On y comptait les hommes marquants qui étaient venus offrir leurs services, et il régnait sur le visage des personnes présentes je ne sais quel air de contrainte. Quand on fut pour distribuer les commandements des diverses brigades, la plupart des chefs se trouvaient absents. Un général, connu pour son énergie, le général Excelmans, refusa de servir sous les ordres du général Pajol, son égal, regardant l’invitation qu’on lui adressait à cet égard comme une insulte à ses épaulettes ; et entre lui et le maréchal Soult, il s’éleva, dans la galerie de Diane, une altercation très-vive, dont la famille royale put entendre les éclats. Le roi montrait beaucoup de sérénité. Rompu à l’art de veiller sur lui-même, il apportait une aisance parfaite dans ses manières et dans ses discours, soit qu’il voulût répandre autour de lui la confiance, soit qu’il comprît que la révolte touchait à sa fin. L’incendie, néanmoins, pouvait à tout instant se rallumer. Dans cette même matinée, M. Marchais passant sous les fenêtres du maréchal Lobau : « Eh bien, lui cria ce dernier, d’un ton moitié plaisant, moitié sérieux, de vous ou de nous, qui s’en va ? »

Les députés de l’Opposition s’étaient, dans l’intervalle, réunis chez M. Laffitte, et l’on y délibérait sous l’empire de la colère ou de la peur. La plupart de ces hommes pusillanimes avaient pâli au seul nom de la république, et déjà devant eux s’étaient dressés tous les noirs fantômes, effroi de leur souvenir. Mais, grâce au ciel ils n’entendaient plus que les derniers cris de la révolte expirante, et furieux de leur frayeur désormais évanouie, ils disaient :