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de la Bastille, du marché Saint-Martin, des Blancs-Manteaux. A huit heures, ils construisaient une barricade près du petit pont de l’Hôtel-Dieu, faisaient reculer un détachement du 25e de ligne, forçaient un détachement de garde municipale à battre en retraite par le quai aux Fleurs, et enveloppaient de toutes parts la préfecture de police.

La nouvelle de ces événements répandit la consternation au château. On y eut en vain cherché cette affluence de visiteurs qui se voit autour des trônes, quand l’éclat des fêtes les entoure et que la force y est assise. La peur avait glacé les dévouements les plus fastueux. Observation banale en vérité et presque superflue dans l’histoire des monarchies Les employés des ministères avaient caché les papiers importants, et déjà l’on ne songeait plus aux Tuileries qu’à des préparatifs de fuite. On y craignait, surtout, que le général Lafayette et le maréchal Clauzel ne se jetassent dans le mouvement. Que n’auraient pu la popularité de l’un et la renommée de l’autre ? La dynastie d’Orléans était perdue alors.

Le maréchal Soult, ministre de la guerre, partageait ces appréhensions. Depuis les récits qui avaient couru autrefois sur les intrigues de ses partisans et sur son désir secret d’être couronné roi de Portugal, on lui prêtait une ambition sans limites. Sa gloire militaire, sa science administrative, son activité infatigable, les brillantes destinées de Bernadotte, son émule, tout laissait supposer qu’il y avait place dans son âme pour les plus vastes desseins. On le savait, d’ailleurs, incapable de désintéressement