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un vol fameux appelait l’attention publique. Le caissier général du trésor, M. Kessner, avait disparu, laissant dans la caisse qui lui était confiée un déficit de plusieurs millions. Indépendamment du désordre que semblait révéler dans la comptabilité, ce déficit, dont le public ignora long-temps le véritable chiffre, il découvrait une des plus hideuses plaies de la civilisation moderne. Car M. Kessner, doué de qualités recommandables et connu pour sa bienfaisance, n’avait été entrainé à l’abîme que par la manie des opérations de Bourse. La Bourse, on le sait, n’est pas seulement un hospice ouvert aux capitaux sans emploi, elle est aussi le repaire de l’agiotage. L’occasion était belle pour examiner quelle influence la Bourse exerce sur le mouvement des capitaux, de quelle nature est l’élan qu’elle imprime à l’esprit de spéculation, s’il est bon de la tolérer et, s’il n’appartient pas, du moins, à un gouvernement, digne de ce nom, d’intervenir activement et sous sa responsabilité là où les fureurs du jeu sont si fécondes en malheurs, en fraudes, en succès odieux et en scandales. Nous exposerons dans le cours de cet ouvrage l’état des finances du royaume, sans négliger l’étude des importants problèmes qu’un pareil exposé soulève. Ces problèmes, la chambre aurait dû les résoudre ; mais détruire les abus était au-dessus du courage d’une assemblée dans laquelle siégeaient tant d’hommes dont ces abus même avaient fait la fortune et constituaient la puissance. La chambre vota donc le budget, après une discussion aussi stérile que laborieuse. Le budget des dépenses ordinaires et