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des mesures brutales, et attisait de leurs mains l’incendie qu’ils auraient dû éteindre. Les visites domiciliaires, en chassant les gentilshommes de leurs châteaux, fournirent des chefs à une insurrection, à laquelle avaient déjà fourni de nombreux soldats les perquisitions, qui chassaient les paysans de leurs chaumières. Ainsi se formérent les bandes.

Alors se levèrent les Delaunay, les Diot, les Mathurin Mandar, aventuriers sans peur, qui, armé d’un fusil, munis d’une gourde, et suivis de quelques compagnons lestes et braves, se mirent à affronter soldats, gendarmes, gardes civiques, et à battre la campagne, tantôt se glissant sur la lisière des bois, tantôt disparaissant derrière les hauts genêts, redoutés dans les villes, mais recueillis fraternellement dans les métairies isolées.

Le brigandage était au bout de ces soulèvements partiels. Des hommes pervers ne tardèrent pas à se mêler aux bandes royalistes, qu’ils compromirent par leurs excès et enveloppèrent dans leur déshonneur. Le gouvernement, de son côté, avait soin de confondre dans un même anathême et les chouans véritables et les hideux auxiliaires que, plus d’une fois cependant, il leur était arrivé non-seulement de désavouer, mais de punir. Bientôt la renommée grossissant le mal et multipliant les désordres, e& répand partout des nouvelles sinistres ; les récits les plus lamentables volent de bouche en bouche : au cri de vengeance, parti de tous les grands centres de populations, les gardes nationaux se rassemblent, prennent les armes ; les patriotes eux-mêmes, quoique ennemis du gouvernement,