Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/128

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rent dans le Collége. « Tous les problèmes, disaient les uns, ne sont pas encore résolus, bien qu’ils soient posés : restons unis, mais que ce soit seulement pour continuer notre œuvre d’élaboration et de propagande. Quand nous aurons gagné à notre cause la société qui nous entoure, elle fera sa révolution. Gardons-nous de créer une petite société au milieu de la grande. Soyons apôtres, et n’aspirons pas à devenir gouvernants. — Nous avons suffisamment dogmatisé, répondaient les autres ; l’essentiel maintenant est de réaliser. Prêchons d’exemple, organisons des travaux, constituons un gouvernement à l’usage de nos idées, sortons de l’état purement apostolique. » Ainsi pensaient Bazard et Enfantin : leur opinion dut naturellement l’emporter. On songea donc à établir des ateliers ; on recruta des adhérents parmi les prolétaires ; on en appela plusieurs, dont les enfants furent adoptés avec des formes solennelles on se partagea ambitieusement la capitale et les provinces, si bien que le saint-simonisme eut sa géographie ; les deux Pères suprêmes prirent le nom de Papes, appellation qui révélait une pensée d’orgueil en même temps qu’elle trahissait un plagiat téméraire ; enfin, la question ne fut plus de composer d’un nombre choisi d’hommes d’élite une synagogue respectable, mais de réunir des forces, dont le Globe, chaque matin, publiait l’emphatique recensement. De cette tendance nouvelle naquirent des illusions à peine croyables. On osa tourner ses regards vers les Tuileries : Louis-Philippe fut sommé par lettres de