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des récentes agitations. On ne s’expliquait pas davantage pourquoi le duc de Bourbon attribuait, dans cet écrit, la propriété de St.-Leu à Louis-Philippe, auquel il savait bien que St.-Leu n’appartenait pas. On était surpris que le prince, ayant saisi la plume au milieu des apprêts d’un suicide, n’eût rien dit de précis sur son fatal projet, et n’eût point prévu à quels affreux soupçons le vague de ses paroles allait exposer ses serviteurs. Dans la manière même dont les deux écrits avaient été découverts, on crut trouver quelque chose d’inconcevable. Ces papiers que le secrétaire de Louis-Philippe et Lecomte avaient si aisément aperçus dans la soirée du 27, par quel singulier hasard avaient-ils échappé, dans la matinée du même jour, aux recherches de M. de Choulot, de Manoury, de Romanzo, et de tous ceux qui avaient, comme eux, visité la cheminée avec le plus grand soin ? Fallait-il supposer que, dans le but d’accréditer l’opinion du suicide, une main furtive avait semé ces fragments dans le foyer, longtemps après la mort du prince ? On les avait découverts sur des cendres de papiers brûlés : comment admettre que le duc de Bourbon, ayant des papiers à anéantir, eût brûlé les uns et déchiré les autres ? Ces singularités conduisaient à penser que l’écrit découvert se rapportait à une date antérieure à l’événement, et n’était qu’un projet de proclamation rédigé par le prince dans les premiers jours du mois d’août, alors que l’orage révolutionnaire grondait encore. On ne tarda pas à apprendre qu’en effet, aux premiers bruits de la tourmente de juillet, le duc de Bourbon avait eu l’idée d’une proclama-