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mels & sans ambiguïté ; les Instructions sont populaires ; les Mysteres sont rapportez dans leur substance & avec peu de circonstances ; les promesses les plus magnifiques, & les menaces les plus terribles, sont proposées sans emphase & sans pompe. L’institution des Sacrements est exposée sans appareil. Tout y fait sentir l’efficace du Saint-Esprit, qui n’a besoin ni de beaucoup de tems, ni de beaucoup de paroles, ni du tour des pensées, ni des agrémens du langage, ni des ornements du discours, pour enseigner.

Quels sens profonds, par exemple, ne renferment pas les huit béatitudes Evangéliques ? Elles peuvent servir de matiere à des années entières de réflexions. Cependant, chacune d’elles est présentée sous l’enveloppe de cinq ou six mots. J’en dis autant de ces maximes, & de ces préceptes. Renoncez à vous-même, le Royaume des Cieux souffre violence ; Il n’y a que les violents qui l’emportent ; Ne craignez point les hommes qui tuënt le corps ; mais craignez celui qui peut perdre le corps & l’âme et les envoyer dans l’enfer : Celui qui ne renonce pas à tout ce qu’il possede, n’est pas digne de moi : Faites pénitence, car le Royaume des Cieux est proche : Que sert à l’homme de gagner tout le monde, s’il perd son ame ?

Ces articles de la Loi de Jésus-Christ ne peuvent être plus clairs, plus précis, plus formels, plus absolus, & plus courts. On ne peut y ajouter un mot qui ne soit de trop, ni en retrancher un qui soit superflu.

Si j’appelle l’Instruction que Jesus-Christ fit sur la montagne un vrai Catéchisme, je lui donne son vrai nom. Si celui de Sermon lui a été donné par les Peres, c’est dans le sens qu’on prend ce mot pour une instruction simple & familiere, dans le sens qu’ils appelloient eux-mêmes Sermons, les instructions claires, courtes & simples qu’ils faisoient aux Fidéles.

En effet, ce sermon de Jesus-Christ sur la montagne est le précis de sa Morale exposée avec clarté, sans prélude, sans partage de Points, sans transitions, sans peintures, sans portraits, sans descriptions, & sans aucune figure. La verité s’y montre à nud, et laisse à la grace seule la vertu de la faire recevoir.

Les Apôtres sont les premiers Catechistes de l’Église. Le nom de Catechisme ne convient-il pas encore parfaitement au premier discours de Saint Pierre, fait après la descente du Saint-Esprit, qui gagna à Jesus-Christ près de trois mille ames ; & au second, qui en convertit cinq mille ? Le Prince des Apôtres paroit-il Orateur ces deux premieres fois qu’il porta la parole devant le peuple ? Prépare-t-il ce qu’il a à dire ? Étudie-t-il ce qu’il doit prouver ? 7. Excellence du Catéchisme. Cherche-t-il dans la force des raisonnemens, de quoi convaincre, ou de quoi plaire dans l’arrangement des paroles & dans la beauté du langage ? Non, le Saint-Esprit qui parloit par sa bouche, ne fait pas dépendre sa puissance sur les cœurs, de l’éloquence humaine.

Si Saint Pierre avait été un Orateur disert, ou un savant Philosophe, qui eût sçû ou persuader l’esprit par la force de ses raisons, ou surprendre le cœur par l’art de bien dire, le Saint-Esprit n’eût pas choisi sa langue pour son organe. Sans sciences humaines, sans talens d’esprit, sans industrie aucune, il était tel que le vouloit le Saint-Esprit, tel qu’il le falloit pour faire honneur à Jésus-Christ. Saint Pierre a converti huit mille ames les deux premieres fois qu’il parle ; quelle efficace de la parole ! Si huit mille Sermons ne convertissent pas aujourd’hui huit personnes, n’est-ce point parce qu’ils ont perdu l’onction & la vertu de ceux de Saint Pierre, parce qu’ils en ont perdu la simplicité, & que ce ne sont plus des Apôtres qui les débitent.

Examinez ces deux Sermons de Saint Pierre, ce sont deux Instructions courtes,