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ment il l’enseigne sans profit pour les ames. Il en coûte, au contraire, infiniment au Prédicateur, sans qu’il en recueille souvent grand fruit. Plus il fait de dépenses en esprit, plus il donne la torture à son imagination pour en faire sortir des idées brillantes & des tours ingénieux, plus il s’épuise le cerveau pour faire un discours achevé : plus, pour l’ordinaire, il se fait admirer & aplaudir ; mais par malheur pour son ministère, plus il se fait admirer & aplaudir, plus il se fait oublier de Dieu, & rend inféconde la semence qu’il a jettée dans le cœur des Auditeurs.

Avoüons donc, que la Doctrine Chrétienne n’étant jamais plus fructueuse ; que quand elle est nuë & simple ; que se plaisant à sortir du cœur plus que de la bouche de ceux qui l’annoncent pour surprendre le cœur de ceux qui l’écoutent ; que perdant la grace & son onction par l’art qu’on lui prête ; la fonction de Catéchiste est celle qui lui convient le plus. Elle est en effet celle que Jesus-Christ & ses Apôtres ont mis en usage, comme il sera dit bien-tôt.

Le Prédicateur enseigne la Doctrine Chrétienne aussi-bien que le Catéchiste ; mais ne puis-je pas dire que le Catéchiste imite de plus près Jesus-Christ dans la maniere de l’enseigner, simple & familiére ; & qu’en ce point il a l’avantage sur le Prédicateur qui orne trop ses discours.

Jesus-Christ est le premier Maître qui ait enseigné Doctrine Chrétienne.
3. Excellence du Catéchisme.

C’est Jesus-Christ qui est le premier Auteur & le premier Maître de la Doctrine Chrétienne : Il s’a aportée du Ciel : Il l’a enseignée sur la terre : Comment ?d’une maniere simple & familiere.

La Doctrine qu’on enseigne dans les Ecoles Chrétiennes, n’est la Doctrine d’aucun homme mortel, pas même d’un Ange. Elle est élevée au-dessus de celle de Moïse, autant que Jesus-Christ l’est au-dessus du Legislateur des Juifs.

Pour ce qui est des autres sciences elles ne méritent pas d’entrer en paraléle avec elle.

La Médecine croit devoir son origine à Esculape & à Hipocrate. La Philosophie nouvelle reconnoît Descartes pour son premier Maître ; l’ancienne fait honneur à Platon, à Aristote à Zenon, à Pitagore, & à plusieurs autres, de ses succès. L’éloquence admire comme ses modéles, Demosthenes & Ciceron. L’art Militaire reconnoit pour ses Heros, les Cesars, les Annibals les Scipions, les Alexandres. Archimede a mis la science des Mathématiques en grand crédit. La Théologie Scholastique honore comme les premiers Maîtres, S. Jean Damascene, Pierre Lombard, Saint Thomas, Saint Bonaventure. Tous les Disciples de ces différens Docteurs se font grosse de les avoir pour Maitres & pour modéles. Ils s’attachent à étudier leur Doctrine & à s’y rendre parfaits. Ce sont des hommes qui sont enseignés par d’autres hommes. Quelque excellente qu’ils vantent la Doctrine qu’ils ont reçûë ils ne peuvent en chercher l’origine dans le Fils de Dieu. La science du Salut est la seule que ce divin Maître ait enseignée. Lui seul est l’Auteur de celle qu’on aprend dans le Catéchisme.

Jesus-Christ n’a discouru ni sur les secrets de la nature comme Salomon ni sur l’art de bien dire, comme Ciceron & Quintillien ni sur la métode de bien raisonner, comme Aristote, ni sur le talent de bien gouverner & de bien policer une République, comme Platon ; ni sur l’art Poëtique, comme Horace ; ni sur celui d’atteindre au sublime, comme Théophraste : En un mot, il ne nous a laissé aucunes instructions sur ce qui est caduc & périssable. Dieu qu’il est, il ne nous a parlé que de Dieu & des choses de Dieu. Tout le reste lui a paru indigne de lui & de nous. Les véritez éternelles dont il a reçû la connois-