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avons crû qu’il faisoit joindre les actions des vertus communes & journalieres aux exemples extraordinaires de la vertu la plus héroïque.

Nous ne pouvions sur ce sujet suivre de meilleurs Guides que les Evangélistes, qui ont joint dans l’histoire de la Vie de J. C. le recit de ses actions communes, & de quantité d’exemples de vertus journalieres, à celui de ses Miracles & de ses vertus les plus divines. Quand on veut écrire la Vie des Saints, peut-on se proposer de plus parfaits modéles, que ceux qui ont prêté leur plume au Saint-Esprit pour faire la relation de la Vie du Saint des Saints ? Si cette histoire de la Vie de Mr De La Salle peut servir à exciter dans les Lecteurs l’horreur du vice & l’atrait de la vertu, le desir de la perfection & un grand courage pour y travailler : si de plus elle réüssit à inspirer un grand zéle pour multiplier les Ecoles gratuites & pour favoriser les Instituts, qui se consacrent à une œuvre si importante, je suis parvenu au but où je voulois arriver, & j’abandonne volontiers à la critique des Connoisseurs le stile, la forme & le plan de cet ouvrage. Je souscris dès-à-present & volontiers à leur mépris ou à leur censure. Content de n’avoir eû qu’un talent, & de l’avoir mis à profit pour le salut du Prochain, je prie le Lecteur d’oublier la maniere dont cette Histoire est écrite, pour ne faire attention qu’aux exemples de vertu qu’elle lui offre à imiter.

On avertit les Freres eux-mêmes de n’être pas surpris de voir ici plusieurs choses qu’ils ignoroient. Ceux-là seuls en ont eû connoissance, qui avoient avec le saint Instituteur un raport plus immédiat, & en qui il avoit plus de confiance, ou qui entroient avec lui dans le maniement de certaines affaires.

Il y a même quelques faits raportez ici, dont aucun des Freres n’avoit connoissance, ou n’en avoit qu’une connoissance confuse ; mais celui-là même, qui a écrit cette Histoire, en ayant été témoin, il n’a pas crû devoir les omettre.

Enfin, il me reste à avertir ici les Lecteurs, qu’en donnant souvent dans le cours de cette Histoire le nom de saint Homme, de saint Prêtre, de saint Instituteur à Mr De La Salle, nous ne le donnons que dans le sens que les Apôtres dans leurs Lettres le donnent aux Chrétiens ; que dans le sens qu’on en qualifie les ames éminentes en vertu, lors même qu’elles vivent encore sur la terre ; que dans le sens qu’on l’attribuë aux personnes décédées en odeur de sainteté, sans vouloir ni directement, ni indirectement, prévenir le jugement de l’Eglise Romaine, à qui il appartient de juger de la sainteté des Fidéles, & de déclarer Saints, ceux dont elle a examiné, approuvé & canonisé la vie. Personne n’est plus que nous soumis au Saint Siége, & plus inviolablement attaché à cette Pierre sur laquelle est bâtie l’Eglise. Nous en avons toujours fait une Profession déclarée, & nous sommes bien aise d’avoir occasion de la rendre publique, & de protester que nous voulons mourir comme nous avons vécu, dans une parfaite obéïssance à Nôtre Saint Pere le Pape, & à l’Eglise Romaine, centre de l’Unité, hors laquelle il n’y a point de salut.