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cœur. Pourquoi l’avoit-il abandonné ? C’est qu’il l’ignoroit. Les parens négligent d’instruire leurs enfans les avoient livrez aux vices & aux passions de la jeunesse, en les abandonnant à l’ignorance de la Loi de Dieu. Quand on a été nourri des paroles de la Foi & de la bonne Doctrine, ce sont les termes de saint Paul (1. Timoth. 4. v. 6. & suiv.) 'on est en état de l’enseigner aux autres, de la méditer, & d’avancer dans les voies de Dieu. C’est ce défaut d’instruction qui fait la perte de la jeunesse, & par conséquent la plus grande plaie de l’Eglise. De sorte que le grand moïen, & peut-être l’unique, de chasser le vice & le peché, & de faire refleurir la piété Chrétienne, est de procurer l’instruction & l’éducation des enfans. Car celui-là ne se trompoit pas, dit trés-bien Gerson, qui assusuroit que si on vouloit essaier la réforme des mœurs des Chrétiens, il faisoit la commencer par les enfans. Non fallebatur ergo, qui affirmavit reparationem morum Ecclesiasticorum si quæratur fieri, inchoandam esse à parvulis. (L. est. consid. 2. post medium.)

Cette maxime étant certaine, il faut convenir que ceux qui mettent les premiers la main à ce grand Ouvrage de la réforme des mœurs, sont ceux qui instruisent & qui élévent saintement les enfans. Combien donc doivent devenir précieux aux yeux du public, les Maîtres & les Maîtresses d’Ecoles Chrétiennes & Gratuites qui lui rendent ce service ? Ils remplacent les parens négligens & incapables de s’acquitter de la plus essentielle de leurs obligations, qui est d’aprendre la Doctrine Chrétienne & la science du salut à leurs enfans, & ils deviennent à l’égard des enfans pauvres & abandonnez, leurs vrais pères & leurs véritables mères en Jesus-Christ.

III.
2. Preuve de l’importance des Instituts des Maîtres & des Maîtresses des Ecoles chrétiennes, prise de l’excellence de la fonction d’enseigner la Doctrine Chrétienne.

Quand il ne seroit pas autant nécessaire qu’il l’est pour être sauvé, de sçavoir la Doctrine Chrétienne, on ne seroit pas excusable de l’ignorer ; car elle mérite infiniment plus que toute autre d’être aprise & enseignée, étant toute divine. Ainsi pour peu qu’on fasse réflexion sur la dignité & son excellence, on conviendra de l’excellence de la vocation de ceux qui se consacrent à l’enseigner. En effet, de quelque côté qu’on envisage la Doctrine Chrétienne, tout y est divin, soit dans son objet, soit dans la fin, soit dans ses caractéres, soit dans ses premiers Maîtres.

On sçait que les sciences tirent leur excellence de leur objet. Plus celui-ci est noble & relevé, plus elles le sont elles-mêmes ; Et plus elles sont elles-mêmes nobles & relevées, plus elles anoblissent la fonction de les enseigner.

Dignité de la fonction d’enseigner la Doctrine Chrétienne.
I. Excellence du Catéchisme.

La Médecine regarde le corps humain ; & c’est de la qualité de cet objet, que ceux qui l’enseignent, se font honneur. La Philosophie s’occupe de la nature & de tout ce qui s’y passe ; & c’est de la noblesse de ces objets, que se glorifient ceux qui en font des leçons. L’Astrologie contemple les Astres, & observe leurs mouvemens, leurs influences, & leurs effets ; & c’est sur la dignité de ces objets, qu’elle mesure la sienne. La Jurisprudence est la science du droit, elle est nécessaire aux Magistrats pour rendre la justice, & a une infinité d’autres qui la mettent à intérêt. C’est ce double avantage qui la rend précieuse.

Or ces sciences & toutes les autres, n’ont que des objets naturels, temporels, passagers, caducs & périssables. La Doctrine Chrétienne seule a pour objet, Dieu, ses perfections, les promesses, ses menaces, sus révélations, ses mystéres incompréhensibles & les loix ; & pour tout dire en un mot l’Eternité. Il faut donc mettre entre la fonction de ceux & de celles qui enseignent la Doctrine Chrétienne, & celle d’un Philosophe, d’un Médecin, d’un Astrologue ; d’un