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DIVERS

train. Les choux, le quartier d’oie, le farci[1], cuisaient dans un long bouillon. Mais, une fois Monmayran parti, plus de bouillon pour tremper la soupe. Rien que les choux, le quartier d’oie, et le farci.

Alors, la maîtresse de la maison souffletait ses filles et sa servante à tour de bras.

— « Carognes ! C’est chaque jour la même chose. Voyez. La marmite a trop bouilli. Rien que les choux, le quartier d’oie, et le farci. Pas une goutte de bouillon. »

À force d’être souffletées, les filles et la servante finirent par se méfier, et surveillèrent Monmayran. Que virent-elles ?

Cinq minutes avant l’Angelus de midi, l’avare fit courir l’œil. Puis, il tira de sous sa veste une grosse seringue, en plongea la canule dans la marmite, tira vite le bâton, et enleva le bouillon. Les filles sautèrent sur les pincettes, la servante sauta sur sa pelle à feu.

— « Mère ! maîtresse ! Courez, courez vite. Nous tenons enfin notre voleur de bouillon. »

La maîtresse empoigna le balai, et toutes ces

  1. La garbure, ou soupe aux choux, de la Gascogne, comporte l’addition d’un quartier d’oie confite à la graisse. On y ajoute volontiers un farci, gâteau fait de mie de pain, d’œufs, et de lard haché.