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LES MORTS

nu comme un ver, un pauvre mort, rongé des chiens. Alors, Jean de Calais devint tout bleu de colère.

— « Mille Dieux ! Suis-je donc dans un pays de païens et de juifs ? N’avez-vous pas honte, canailles, de laisser ainsi ce pauvre mort, nu comme un ver, et rongé des chiens ?

— Passant , tâche de mieux parler. Sinon, gare à toi. »

Jean de Calais tira son épée.

— « Je parle comme il me plaît, ivrognes. Avancez. Tous, tant que vous êtes, je vous emmerde, à pied et à cheval. Voyons, bandits, avancez un peu. »

Alors, les gens du village baissèrent la voix, et répondirent honnêtement :

— « Passant, ne te fâche pas. Cet homme n’a que ce qu’il mérite. Il est mort sans payer ses dettes. En pareil cas, la coutume de ce pays veut que le corps soit jeté tout nu sur le bord de l’eau. Les chiens le rongent, en attendant que la Garonne monte et l’emporte. Le reste profite aux poissons.

— Cochons ! Vous n’êtes donc pas chrétiens ? Combien devait le pauvre mort, salauds ?

— Passant, le mort devait six mille pistoles.

— En voilà sept, valets de bourreau. Payez-vous. Le reste est pour faire dire des messes.