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SUPERSTITIONS

sortit du vieux saule creux, passa son fusil en bandoulière, siffla son chien, et retourna tranquillement chez les siens.

— « Bonjour, chers parents. J’ai fini de souffrir. Cette nuit, en dansant, les Sept Belles Demoiselles ont chanté force choses que les gens du pays sauront bientôt. Napoléon a fini de faire bataille contre tous les rois de la terre. Les ennemis de Napoléon l’ont emmené prisonnier, dans une île de la mer, dans l’île de Sainte-Hélène. La paix est faite. À Paris, le roi de France est retourné dans son Louvre. »

On ne tarda pas à savoir que les Sept Belles Demoiselles avaient chanté vrai. Désormais, le Déserteur n’avait plus à craindre les gendarmes et les garnisaires. Il demeura chez ses parents, se maria, et vécut longtemps heureux[1]

  1. Dicté par feu Cazaux, de Lectoure, dont le récit est identique, pour le fond, à celui que me fit, quand j’étais jeune, un autre vieillard nommé Jacques Bonnet, métayer à la Cassagne, commune de Lectoure (Gers). La croyance aux « Sept Belles Demoiselles, qui savent tout ce qui se fait et tout ce qui se fera », n’est pas encore éteinte dans mon pays natal. Mais je n’ai entendu que Cazaux et Jacques Bonnet, parler de l’aventure du Déserteur. L’adaptation des faits historiques à la légende est exacte, ou peu s’en faut. On sait, en effet, que Napoléon perdit, le 18 juin 1815, la bataille de Waterloo. La nouvelle de cette défaite, ne fut universellement connue de nos paysans que vers la fin du même mois.