loin, et revint à l’écurie mettre la bride à son cheval. C’était au temps du mois mort[1]. Il faisait noir comme dans un four. Sur le coup de onze heures de la nuit, le meunier monta à cheval, armé d’un coutelas, car il lui fallait traverser de grands bois, et il craignait les mauvaises rencontres de loups et de voleurs.
En traversant le Ramier[2], tout alla bien. Le meunier content, tira sur la bride du côté de Lamothe-Goas[3], et ne tarda pas à sommeiller sur le bât, car le cheval allait au pas. Combien de temps le cavalier dormit-il ainsi ? Jamais il n’a pu le dire. Quand il se réveilla, il était prisonnier, serré de tous côtés par de grands chênes, par des arbres couchés et des branches mortes, par des ronces et des épines, si pressées, si pressées, qu’un serpent ou une vipère n’auraient pu y trouver passage. Les feuilles sèches tremblaient ; les branches se rompaient ou claquaient. Les buissons, que nulle serpe n’avait jamais émondés, égratignaient le cavalier et le cheval, sans leur permettre de faire un pas.
Le meunier comprit alors qu’il était tombé dans une assemblée de Mauvais Esprits, qui pren-