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TRADITIONS


pouvoir entra dans la chambre, enchaîna son ennemi avec une chaîne de fer du poids de sept quintaux, et l’emporta, à travers les nuages, sur la cime d’une haute montagne, dans une île de la mer. Là, il enfonça le bout de la chaîne dans le roc, et le consolida, avec du plomb et du soufre, mieux que n’eût fait le meilleur maître serrurier. Cela fait, il siffla. Aussitôt, accoururent deux loups, grands comme des taureaux, l’un noir comme suie, l’autre blanc comme neige. Le loup blanc veillait le jour, et dormait la nuit. Le loup noir veillait la nuit, et dormait le jour[1].

— « Loups, gardez bien le Roi des Corbeaux.

— Maître, vous serez obéi. »

Le méchant gueux partit, et le Roi des Corbeaux demeura seul, avec les deux loups, enchaîné, sur la cime d’une haute montagne, dans une île de la mer.

Pendant que cela se passait, la reine était sortie du château. Elle marchait, marchait, toujours tout droit devant elle, et pleurait toutes les larmes de ses yeux. À force de marcher, elle arriva, toujours pleurant, à la cime de la montagne haute et sans neige, où étaient le lavoir et la pauvre cabane de la vieille lavandière.

  1. Un de mes conteurs, Briscadieu, parle seul d’un grand loup, blanc le jour, noir la nuit, et qui veillait constamment.