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LES BELLES PERSÉCUTÉES


teau du roi où le valet l’avait placée. Ce roi avait un fils si fort, si hardi, si beau garçon, que toutes les filles du pays en tombaient amoureuses. La gardeuse de dindons fit comme les autres ; mais il ne la regardait même pas.

— « Mal appris, pensait-elle souvent, je te forcerai bien à me regarder. »

Le temps du carnaval arriva. Chaque soir, après souper, le fils du roi s’habillait de neuf, et montait à cheval, pour s’en aller danser, jusqu’au lendemain matin, dans les châteaux du voisinage. Que fit la gardeuse de dindons ? Pendant la veillée, elle se dit malade, et fit semblant d’aller se coucher. Mais elle descendit secrètement à l’écurie, sella et brida un cheval, et lui donna double picotin d’avoine. Ensuite, elle remonta dans sa chambre, ouvrit la besace où étaient les hardes qu’elle avait rapportées de chez son père. Cela fait, elle se peigna, avec un peigne d’or, se chaussa de bas blancs, et de petits souliers rouges en maroquin de Flandre, mit une belle robe couleur du ciel, redescendit à l’écurie, sauta sur son cheval, et partit au galop pour le château où le fils du roi s’en était allé danser.

Quand elle entra dans le bal, les joueurs de vielle et de violon cessèrent de jouer, les danseurs de danser, et tous les invités disaient :

— « Quelle est cette belle demoiselle ? »