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CHÂTIMENTS


n’as pas tort de n’avoir pas pensionné le centième père, comme les nonante-neuf autres. Sinon, je ne donnerais pas deux liards de ton cou.

— Roi, je crois mon cou fort solide. Ce n’est pas sur lui que votre bourreau travaillera. Pendant que vous étiez à dîner et à jouer aux cartes, avec les nobles et les riches, on est venu me dire qu’il y avait, au bois du Gajan[1], un bûcheron, marié avec une femme belle comme le jour, et sage comme une sainte. Cinq fois, la femme a fait, tous les ans, deux frères jumeaux. Hier, elle en a fait deux autres. Sur-le-champ, j’ai commandé de payer la pension. Un valet la portera demain matin.

— Mon ami, tu ne voles pas tes gages. Je suis content de toi. Donne au valet une charge d’or, pour la porter au bûcheron. Aussitôt que cet or lui sera compté, le bûcheron partira, avec ses enfants, grands et petits, pour ne revenir jamais, jamais. Il laissera sa femme, toute seulette dans sa maison.

— Roi, vous serez obéi. »

Le lendemain soir, tout était fait comme le roi avait dit.

Trois mois se passèrent, sans qu’il fût plus parlé

  1. Forêt entre Lectoure et Miradoux (Gers). Elle est aujourd’hui beaucoup moins grande qu’il y a vingt ans.