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ET VENGEANCES


— « Ta femme arrive demain. Tant mieux. Trinquons à sa santé. »

Alors, le roi tira son épée, et la posa sur la table.

— « Écoutez, ma mère, ma pauvre mère. Vous voulez m’empoisonner. Je vous pardonne. Mais mon père, lui, ne vous pardonne pas. Par trois fois, il est revenu de l’autre monde, et m’a dit : « Ta mère m’a empoisonné. Tu es roi. Fais-moi justice. » Hier, j’ai répondu : « Père, vous serez obéi. » Ma mère, ma pauvre mère, priez Dieu qu’il ait pitié de votre âme. Regardez cette épée. Regardez-la bien. Le temps de dire un Pater, et je vous tranche la tête, si vous n’avez pas bu le poison que vous m’avez versé. Buvez, buvez jusqu’au fond, ma mère, ma pauvre mère. »

La reine vida le verre jusqu’au fond. Cinq minutes après, elle était verte comme l’herbe.

— « Pardonnez-moi, ma mère, ma pauvre mère.

— Non. »

La reine tomba sous la table. Elle était morte. Alors, le roi s’agenouilla, et pria Dieu. Puis il descendit doucement, doucement à l’écurie, sauta sur son cheval, et partit au grand galop dans la nuit noire.

On ne l’a revu jamais, jamais[1].

  1. Dicté par Catherine Sustrac, de Sainte-Eulalie, canton de