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Tout cela attira sur lui l’attention : il fut nommé membre du conseil paroissial, dont il devint bientôt le président. Dans cette fonction il montra un intérêt tout particulier pour les écoles qui, sous sa direction, devinrent remarquablement prospères.

Knud Aakre était un homme de petite taille, aux mouvements vifs, avec de petits yeux toujours en éveil, et des cheveux toujours en désordre. Derrière ses grosses lèvres, une rangée de dents splendides semblait jeter des éclairs à chaque parole qui sortait de sa bouche, et ces paroles étaient toujours un peu cassantes, mais d’une clarté et d’une netteté singulières.

Au premier rang parmi tous ceux à l’éducation desquels il avait travaillé, se trouvait un de ses voisins, Lars Högstad. Lars n’était guère plus jeune que lui, mais son développement avait été plus lent. Knud aimait à parler de ce qu’il avait lu et pensé ; il trouvait dans la personne de Lars, dont les manières étaient tranquilles et graves, un auditeur attentif qui, par degrés, devint un homme d’excellent jugement. Les relations entre eux furent bientôt si étroites que Knud ne se décidait guère à quelque démarche importante sans avoir d’abord consulté Lars Högstad, et l’objet en question y gagnait toujours au point de vue pratique. Il fit entrer son voisin dans le conseil paroissial et, graduellement, partout où il avait voix au chapitre. Ils se rendaient toujours ensemble, dans le même véhicule, aux réunions du conseil, où Lars n’ouvrait jamais la bouche ; mais, à l’aller et au retour, Knud l’écoutait dire son avis. Ils étaient inséparables.


Un beau jour d’automne, le conseil eut à examiner, parmi d’autres objets, une motion du bailli, qui proposait de vendre le grenier à blé de la paroisse, et d’établir, avec le produit de cette vente, une petite caisse d’épargne. Knud Aakre eût certainement appuyé cette mesure si son jugement n’avait pas été prévenu. Il l’était, d’abord parce que la proposition émanait du bailli, que Wergeland n’aimait pas et qui, par conséquent, n’était pas bien dans les papiers de Knud, ensuite parce que le magasin avait été bâti par son grand-père paternel, homme influent, qui en avait fait don ensuite à la paroisse. En réalité,