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EN CANOT DE PAPIER.

verser un fouillis de végétation, passer sur des terres inondées et pousser le canot dans le Sound. Mais alors je ramai comme si ma vie eût dépendu de mon énergie, côtoyant les marais de près et rassuré par la possession de ma carte, qui me promettait le secours de l’eau pour mon canot. La route que j’avais à faire était de suivre la côte du Sound depuis le point par où j’étais entré, puis de traverser les embouchures des rivières Combatrec et Bull jusqu’à l’entrée du grand Coosaw. Je devais remonter cette dernière rivière pendant sept milles encore et camper sur la première terre élevée que je rencontrerais jusqu’au lendemain matin. La marée était maintenant contre moi, et la nuit se faisait pendant que mon fidèle canot était drossé le long des marais jusqu’à l’embouchure du Combatree, que j’avais encore à remonter l’espace d’un demi-mille pour me débarrasser d’un banc de frétillants marsouins qui péchaient dans le courant.

Alors, descendant sur l’autre rive, je fis encore onze milles dans l’obscurité ; mais une demi-heure avant d’atteindre la large embouchure du Bull, quelques énormes black-fish apportés par la mer sautèrent autour de moi, soufflant et cabriolant, pendant que leurs voisins plus démonstratifs, les marsouins, faisaient des bonds dans l’atmosphère brumeuse ; ils occupaient tellement mon attention, qu’au lieu de gagner le Coosaw je pris sans le savoir la rivière du Bull, où je me trouvai bientôt perdu dans les sinuosités de la rivière.

Je passais très-près des rives marécageuses de ce cours d’eau pour éviter le violent courant de son chenal,