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EN CANOT DE PAPIER.

dans un coin, fut bien vite allumé avec du bois menu qui flambait bien. Pendant que je préparais mon souper, le petit bateau à hélice le Cygnet, qui faisait le service entre Norfolk et Vanslyck, mit à terre une femme âgée qui venait de passer deux ans dans sa famille. Elle accosta gracieusement le nain noir, en lui disant : « Charles, pouvez-vous me donner une allumette pour ma pipe ? — Oui, madame, répondit-il poliment en lui passant du feu. — Bon, très-bon, se dit-elle à elle-même en tirant quelques bouffées de tabac de sa pipe à petit tuyau. Quel bonheur de n’avoir plus rien à démêler avec les gens de la ville et d’être à l’abri de leurs manières roides et de leurs façons étranges ! Ils vous font des observations s’il vous arrive de mettre votre couteau dans votre bouche à la place de votre fourchette, et vous donnent du thé de Chine au lieu du bon vieux yaupon. Charles, vous ne pouvez pas savoir combien je désire boire une tasse de bon yaupon. »

Comme le lecteur va entrer avec moi dans des pays où les classes laborieuses demandent exclusivement à la nature la boisson qui « excite sans enivrer », je décrirai l’arbuste qui la produit.

Ce succédané, qui remplace le thé de Chine, est une variété de houx (ilex) ; il est nommé yaupon (cassine, Linn.) par les indigènes. C’est un bel arbuste qui s’élève à quelques pieds de hauteur, aux feuilles alternes, vivaces, qui produit de petites graines rouges. On le trouve dans le voisinage de l’eau salée, dans les sols légers de la Virginie et des Carolines. Les feuilles et les bourgeons sont séchés par les femmes du pays et vendus