Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 3.djvu/89

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
79
VIE ET ŒUVRE

avec des phrases empruntées à la science, la philosophie, l’art et la morale. C’est un pâté fait de farine moisie et de beurre rance, aux truffes, au sterlet et à l’ananas. »

Cette même année Tolstoï lut aussi Molière.

Le journal de Tolstoï, à dater du 1er novembre 1865, présente une interruption de treize années. Nous l’attribuons aux soucis domestiques et aussi à l’activité littéraire qui alors absorba toutes ses forces spirituelles.

Nous avons déjà mentionné qu’à cette période de sa vie un des plaisirs favoris de Tolstoï était la chasse. Mme T. A. Kouzminsky, qui accompagnait souvent Léon Nicolaievitch dans ses parties de chasse, en relate ainsi un épisode.

« Il était infatigable. Son entraînement à la chasse était si grand que rien ne pouvait l’arrêter. Je me souviens qu’une fois, m’étant penchée un peu trop en avant, la selle tourna sous moi ; et je me sentis glisser avec elle. Je me trouvai bientôt tellement sur le côté que j’eus peur de tomber et de m’embarrasser le pied dans l’étrier. J’arrêtai mon cheval et attendis Bibikov ou Léon Nicolaievitch. Tout à coup, j’entends un bruit : un lièvre file et derrière lui tous les chiens ; les deux miens se joignent à eux. À peu de distance suit Léon Nicolaievitch et je lui crie : — Léon ! je tombe, la selle a glissé ! — Il me crie sans s’arrêter : Attends, ma chérie, tout de suite. Je compris qu’il ne s’arrêterait pas et l’attendis patiemment, suspendue de côté. Par bonheur, Biélogoubka, le cheval que je montais toujours, resta immobile comme un roc, et quelques secondes après Léon Nicolaievitch